5 mai 2021

Carnet d'adresses

Ce soir, j’ai voulu mettre un peu d’ordre dans mon carnet d’adresses.

Certains noms ne me disaient rien. Qui étaient donc ces gens? Ils furent assez importants pour que je note leurs noms et leurs adresses. À côté du nom des gens, inscrivons une date pour que 25 ou 40 ans plus tard on puisse avoir un repère.


J’ai dû effacer plusieurs noms, des gens qui ne sont plus de ce monde. En effaçant quelqu’un de son carnet d’adresses, on refait un deuil, on revoit des épisodes de sa propre vie, car ces gens en ont fait partie. Nous n’effaçons pas ces épisodes, au contraire, on repasse de bons moments dans notre tête, et puis on réalise qu’on ne téléphonera plus à ces gens.


Je suis tombé sur Jean-Paul. Il avait été un grand frère pour moi. C’était un garçon intelligent, instruit, il tenait à partager ce qu’il savait. On s’est perdu de vue. Un jour, des années plus tard, il m’a téléphoné pour m’inviter à partager un repas, avec les siens. Il habitait une grande maison dans une ville voisine de la mienne. Il était content de me revoir, on aurait dit qu’il était rassuré de me savoir là. L’atmosphère était, comment dire, étrange. Sans trop en parler, il revivait le passé, l’époque de notre adolescence. Son épouse et ses deux filles étaient présentes, mais c’est comme s’il était seul avec moi, dans un autre monde. Malgré ses nombreux diplômes, il n’avait pas décroché un emploi à la hauteur de ses espérances. La vie de famille ne semblait pas l’emballer non plus. Un an plus tard, on me téléphona pour m’annoncer sa mort, il s’était enlevé la vie. Comme on m’avait contacté, j'ai pensé que mon nom figurait dans son carnet d’adresses. Je n'étais donc pas n'importe qui à ses yeux. Je pense souvent à cela. Les gens dont les noms figurent dans votre carnet d’adresses sont importants. Il est même permis de les contacter et si ça survient, entretenez ensuite la relation.


Je me demande dans combien de carnets d’adresses mon nom apparaît. Il y a peut-être quelqu’un, en ce moment même, qui se demande ce que je suis devenu, si je suis encore de ce monde…


Chacun de nous doit avoir un carnet d’adresses. Nos proches se serviront de ce carnet pour informer ces gens quand nous quitterons ce monde. Tout ce qui est numérique, sur le WEB, dans un nuage ou sur une clé USB est difficilement accessible. Dans vos carnets d’adresses, à côté du nom des gens, notez qui sont ces gens, pour quelle raison ils apparaissent dans votre précieux répertoire.

31 commentaires:

  1. Votre texte est très touchant. C'est important, ces noms sur les carnets d'adresse et je pense que pour mieux mesurer toute l'importance des gens avec qui nous sommes en relation, nous devrions tous en avoir un sous forme d'un répertoire papier. Je me souviens d'une époque déjà lointaine où on connaissait par cœur les numéros de téléphone et les adresses, et maintenant, si on perd un téléphone, on ne peut plus joindre personne....
    Bonne journée.

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. Que c'est vrai! Il n'est pas nécessairement facile de retracer quelqu'un. De nos jours on déménage souvent, on change de no. de téléphone, d'adresse courriel.

      Quand au répertoire papier, j'en ai un et je l'utilise souvent. Écrire ce billet improvisé m'a donné l'idée de le remplacer et d'y inscrire l'adresse électronique quand il y en a une.

      À ma mort, j'aimerais bien vous envoyer un p'tit mot! Comment faire? Je crois que je préparerai un message et le joindrai à mon testament, avec le mot de passe de mon blogue. Autour de moi, absolument personne n'est au courant de l'existence de ce blogue!

      Effacer
  2. Je propose d'ajouter des cases en fin de chaque ligne du carnet d'adresses, pour y cocher ou non : "l'informer de ma mort", "l'inviter aux obsèques", "ne pas lui donner d'alcool"…

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. Cher Indivicdu,

      Voilà donc une autre information à ajouter à mon calepin. C'est très judicieux. Vous même, Individu1671137, comment diable pourrais-je vous identifier?

      Effacer
    2. Vous savez déjà que c’est un homme, qu’il est né en novembre 1967 dans le département de l’Indre et Loire ... 😁

      Effacer
  3. Il y a de quoi réfléchir! Il y a environ 6 semaines, mon meilleur ami de collège de 1957 à 1965 m’a contacté. Je n’avais pas eu de ses nouvelles depuis 1965. Depuis, nous nous téléphonons toutes les semaines. C’est bon de recréer des contacts. Dans notre cas, nous avons la même voix, les mêmes réflexions. Comme nous communiquons seulement par téléphone, nous ne sommes pas conscients de notre changement physique. Et au fond, c’est peut-être mieux comme ça.

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. Salut Jackss!

      C'est une belle histoire ça! Retrouver un ami du collège, un ami que l'on n'a pas vu ou contacté depuis... 56 ans! Wow! Vous devez en avoir des choses à vous dire! Faudrait écrire un long billet là-dessus, j'aimerais bien en savoir plus à ce sujet.

      Effacer
  4. ça fait justement quelques mois - à cause de cette pandémie, sans doute - que je me dis que je devrais faire le ménage dans mon carnet d'adresses, certaines personnes ont si souvent déménagé qu'il n'y a plus de place parmi les ratures ;-)

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. Bien vrai, ça prend un cahier auquel on peut ajouter des feuilles. Ma mère a quelque chose comme ça. Elle a ajouté plusieurs pages, des notes ayant un rapport avec certaines personnes.

      Effacer
  5. Du coup j'ai été plonger dans mon carnet d'adresses qui se trouve sur internet. C'est fou le nombre de gens que j'ai connus et c'est dingue le nombre de gens que j'ai perdus de vue !! Nos chemins se croisent puis se séparent. Un sentiment de culpabilité m'attrape: J'aurais du garder plus de contacts !!

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. En effet, je ressens la même chose. Il y a les amis d'autrefois, ceux et celles du collège, les gens avec lesquels je faisais du sport, les ex collègues de travail, la parenté, les simples connaissances... Assez curieusement, les personnes avec lesquelles j'aimerais communiquer sont rarement des proches, ce ne sont pas des gens avec lesquels j'ai nécessairement beaucoup échangé.

      Effacer
  6. Salut Grand-Langue,

    Je suis pas mal de ceux qui se demandent "Que sont-ils devenus?" en repensant à des amis ou connaissances d'enfance, du secondaire, cégep, université, d'anciens collègues de travail ou même ceux qui fréquentaient les BBS avant internet. Parfois j'en retrouve un sur linkedin, Facebook ou ailleurs et ça me fait plaisir, surtout quand ça fait des dizaines d'années. Je suis alors curieux de savoir quelle vie ils ont fait, le chemin parcouru depuis. Certains sont devenus ce qui se dessinait à l'époque, d'autres ont pris complètement un chemin différent. Quelques années après avoir complété mes études secondaires, un conventum avait été organisé, mais aujourd'hui, 40 et quelques années plus tard, ce serait encore plus intéressant.

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. Oh que oui! Revoir des gens avec lesquels on a longtemps échangé ou vécu, ça rassure. Le jugement n'est pas de la partie, c'est ce qui est fondamental qui compte. La Vie nous a réservé des surprises, heureuses et malheureuses et à mesure que les années passent, on se croit peu moins invincibles. Ça fait du bien de se retrouver entre « survivants », ne serait-ce que pour se raconter nos parcours et comment on perçoit la vie au présent.

      Par contre, les rencontres de groupes m'attirent moins. Dès qu'il y a un trop grand nombre d'individus, la communication perd un peu de son authenticité, on dirait que les bilans de vie deviennent exagérément positifs. Enfin, cela a tout de même l'avantage de favoriser les rencontres des personnes avec lesquelles on veut échanger d'avantage. J'imagine que les échanges d'adresses électroniques doivent être populaires.

      Effacer
  7. Mais, parlez-en autour de vous ! Faites-le connaître, sans hésiter.

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. Justement, j'hésite. Je me sens plus libre d'écrire ce que je veux sans craindre que l'on fasse des liens, qu'ils soient vrais ou non.

      Effacer
  8. J'ai plusieurs carnets d'adresses, un des années 70, un des années 80 et 90, un autre des années 2000. J'ai justement mis, il y a quelques semaines, à côté des noms de gens inscrits qui ils étaient pour moi (collègues de travail, famille, copains de lycée, de fac, de vacances...). J'ai beaucoup de noms barrés, surtout la famille, mes ancêtres. Et un copain de mon mari qui s'est suicidé au milieu des années 80 et un autre décédé du cancer en 1997... C'est dur d'avancer dans la vie avec la liste des personnes décédées, que nous avons aimées, qui ont croisé notre route. On ne s'y fait pas. Bon week end. Merci pour cette note touchante.

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. Bonjour Élisabeth,

      Ce fut une bonne idée de conserver ces anciens carnets. Au fur et à mesure que le temps passe, notre regard change face aux gens que l'on a croisé au cours de notre vie. C'est peut-être ça la maturité. Les aléas de la vie font que nous perdons de vue certaines personnes, on n'y pense plus. Des années plus tard, on se demande ce qu'elles sont devenues et sans savoir pourquoi on veut absolument savoir ce qu'elles sont devenues.

      Quant aux disparus, le seul fait de revoir leur nom nous fait réaliser que d'aucune façon on ne les reverra... ici-bas. Ainsi, l'importance de garder contact avec ceux qui sont ici revêt une toute autre signification.

      Effacer
  9. J'ai retrouvé une amie d'enfance, je ne l'avais pas vue depuis bien une trentaine d'années...Il est important de garder des liens

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. Gazou,

      Wow, une telle rencontre redonne goût à la vie, ça remet les choses en perspective. Le plaisir de revoir quelqu'un qu'on avait presqu'oublié est décuplé. Il n'y a pas de jugement, pas d'idées préconçues, pas de critères jadis associés à l'époque.

      Bonne journée Gazou!

      Effacer
  10. J'ai le même sentiment que toi, surtout depuis que j'ai quitté ma région natale.. on perd des amis mais j'ai constaté que les vrais amis nous suivent...
    Ainsi va la vie... bonne journée

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. Je ne doute pas des vrais amis mais si on ne se parle jamais ou qu'on ne se rencontre jamais alors, forcément, le lien s'atténue même si dans notre cœur, on sera toujours disponible pour ces gens.

      Effacer
  11. Bonne idée que d'ajouter qui sont ces gens...
    C'est toujours sympa de se replonger dans son carnet d'adresses.
    Merci pour la rélexion.
    Bonne journée

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. En effet, je n'ai pas fini d'y inclure tous mes contacts, amis, parents, simple connaissances, etc.

      Je récupère des listes de gens qui trainaient ça et là, club de lecture, anciens élèves, clubs sportifs, etc. Des visages refont surface, des moments que j'avais en mémoire, dans des « tiroirs » bien fermés. Finalement, en mettant bout à bout tous ces noms, on revoit notre vie.

      Effacer
  12. Bonjour,

    Des carnets, j'en ai plusieurs, en plusieurs endroits, en fonction des pages tournées dans ma vie... les seuls contacts qui figurent dans tous les carnets sont les membres de ma famille proche, mais les coordonnées ont changé en fonction des aléas de leurs vies respectives !
    Curieusement, le jeudi de l'Ascension (13 mai), mon téléphone a sonné une fois en mon absence, appelé par un numéro hors les frontières, mais quand même en Europe (j'ai enquêté) qui a raccroché puis rappelé et laissé un message sur le répondeur : une collègue d'il y a 40 ans, se demandait si c'était bien moi... et m'invitait à ne pas la rappeler parce qu'elle vivait à l'étranger (sans précision) et que c'était compliqué de la joindre, mais que je pouvais toujours communiquer avec elle sur Facebook où je n'ai pas de compte (et ne l'ai d'ailleurs pas trouvée) ou sur WhatsApp que je n'ai pas non plus sur mon vieux téléphone filaire fixe, à ce jour j'ignore toujours que faire de ce message et n'ai pas encore pris une quelconque décision ???

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. Étrange appel! Je serais méfiant mais par curiosité j'aurais aussi tenté de la repérer sur FB. J'ai moi-même un compte, justement pour repérer des gens connus autrefois et c'est le meilleur « carnet d'adresse » qui soit. Cependant je ne suis pas actif sur cette plateforme.

      FB c'est n'importe quoi. Il y a certainement du bon mais... ma vie est ailleurs.

      Effacer
  13. C’est drôle, il n’y a pas longtemps, je parcourais mon répertoire de contacts dans mon téléphone et je tombe soudain sur deux noms qui ne m’évoquaient plus rien du tout. Je me suis dit que c’était bizarre d’avoir un jour pris le numéro d’une personne et de n’en avoir aucun souvenir. Une certaine Francoise L. Et un certain David.
    C’est fou.
    J’ai beaucoup aimé votre billet, et notamment votre rencontre avec le dénommé Jean-Paul.
    Bien à vous cher ami.
    •.¸¸.•*`*•.¸¸☆

    RépondreEffacer
  14. Jean-Paul, en plus d'être l'aîné de 9 enfants (7 garçons et deux filles adoptées), il se sentait responsable des gens avec lesquels il se trouvait. Quand nous allions au cinéma, il nous expliquait le contexte du film que nous allions voir, il nous amenait dans les laboratoires de l'Université de Montréal pour nous instruire des recherches auxquelles il participait, il s'assurait que tout son entourage allait bien.

    On l'appréciait mais... on ne lui a peut-être pas dit. Plus tard, loin de sa « meute », il a dû se sentir seul, avoir ressenti un vide autour de lui. Il ne partageait peut-être plus ses connaissances avec quiconque.

    Et ce n'est qu'aujourd'hui que j'y pense...

    RépondreEffacer
  15. Bonjour. Je n'ai plus de carnet d'adresses. C'est étrange. Les gens que je connais sont maintenant dans mon téléphone portable et ils se baladent tous les jours avec moi car je suis toujours avec mon téléphone. Que de km parcourus en ma compagnie, qu'est-ce qu'ils doivent se marrer, tous dans mon sac à main, ou alors posés sur ma table de bureau ou alors sur la table du salon. La nuit, ils dorment tous car le téléphone est éteint. C'est une touchante histoire que vous nous contez là et qui fait réfléchir. J'avoue avoir fait le vide de bcp de connaissances ces dernières années, non pas que je n'arrive pas à garder les contacts mais peut-être parce que je privilégie plus les vraies amitiés. Bises alpines.

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. Bonjour Dédé,

      En effet, c'est presque devenu la norme que de traîner ses connaissances avec soi dans une puce. Si ce n'est pas le téléphone c'est l'ordinateur, la tablette ou l'équivalent.

      « Les vrais amis », je ne sais pas ce que c'est exactement mais ceux et celles que l'on voit en « vrai » ont un statut particulier, nul doute. Il y a surtout ces gens avec lesquels les échanges sont plus profonds ou plus intimes.

      On ne peut rester en contact avec tout le monde. Avoir des centaines d'amis ça signifie peut-être en avoir aucun! Ça donne le vertige.

      Effacer
  16. Bonjour,
    J'ai eu des carnets d'adresses mais j'avoue qu'à présent ils dorment dans un placard. J'ai quitté le Québec en 1992 pour m'installer en France. Je suis arrivée alors avec mon carnet (chose précieuse .... il y avait tous mes amis) Les années sont passées certains sont encore là et d'autres partis. C'est la vie !
    Belle journée

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. Bonjour Petits Bonheurs!

      Changer de pays, c'est plus qu'une aventure! Tôt ou tard on se demande ce que les « autres » sont devenus. Il m'arrive de penser à des gens que j'ai croisé dans ma vie, des gens avec lesquels je n'avais presque pas d'interaction, reste que je me demande ce qu'ils sont devenus.

      Avec le temps on n'imagine plus ces personnes de la même façon, il m'arrive de réaliser que ces hommes et ces femmes croisés avaient quelque chose de... « spécial» alors qu'à l'époque je ne m'étais pas attardé à cela.

      Comme vous le dites... c'est la vie.

      Merci de votre visite, je ferai de même.

      Effacer