2 février 2014

Attention au Bâillon

En pleine période de débat concernant l’interdiction de signes religieux dans la fonction publique, une musulmane meurt accidentellement après que son hidjab se fut coincé dans le mécanisme d’un escalier mécanique. Quelle mort atroce! Inévitablement, cela entraina des propos sarcastiques (mot à la mode : inappropriés) de la part d’individus actifs sur les médias dits sociaux. Quoi de neuf madame la marquise? Je ne suis ni surpris ni même très choqué (notez que je pourrais faire semblant).
Un incendie tue 32 vieillards dans une maison de retraite à L’Isle-Verte. Voilà un autre drame récent, une horreur. Quelques jours plus tard, près de moi, des gens font des jeux de mots en rapport avec le triste évènement. Certaines blagues étaient drôles, déplacées, mais drôles je l’avoue.
Se moquait-on des victimes? Des familles des victimes? Non, bien sûr. Le rire constitue une soupape pour tout ce qui nous empoisonne. Rire n’empêche pas de prendre la vie au sérieux, mais cela aide à ne pas se prendre soi-même au sérieux. Il serait facile de faire comme ces animateurs de radio et de télé : simuler une ambiance de deuil exagérée pour chaque mortalité annoncée, même si on ne connait pas les victimes ou les proches?
La vie continue. Nous devons penser aux vraies choses : faire l’impossible pour prévenir la répétition, dédommager la famille des victimes, les soutenir. Cela va de soi. Les exemples sont multiples, quotidiens sauf que lorsque le drame se produit dans notre société, il y a toujours quelques personnes pour exiger des lois, des façons de communiquer ou de parler sans froisser qui que ce soit. On voudrait que les autres pensent et agissent d’une seule façon : comme la nôtre. J’ai entendu des animateurs publics proposer l’usage d’un langage prédéfini, l’emploi de mots triés. Il ne faudrait pas dire telle ou telle chose, éviter tout propos susceptible de provoquer des remarques, des rires ou des cris. Bref, ça ressemblait à de l'autocensure. Rien n’est pire que l’autocensure.
Dans le pays qui se vante sans cesse d'être démocratique (sic) : les É.-U., on devait se taire après 911. Aujourd’hui encore, on peut procéder à des arrestations sous simple dénonciation aux É.-U. et dans plusieurs pays dits alliés. Fallait y être quelques mois après les évènements pour constater qu’absolument personne ne pouvait critiquer le président ou l’administration américaine en public sans risquer de se faire arrêter puis interroger. Quel rapport avec le sujet? La liberté d’expression. On ne pouvait qu’être avec eux ou contre eux, aucun espace à la critique, à la contestation.
Quiconque souhaite, par la censure ou la loi, faire taire ceux et celles qui pensent différemment, méprise le peuple. Cela revient à infantiliser le lecteur, le téléspectateur ou l’auditeur. Décider pour les autres c'est croire le public incapable de choisir, de filtrer. En limitant les mots et les opinions au public, comment pourrait-il juger? Ça n’a aucun sens.
Des cas moins clairs :
En France on a interdit un spectacle de Dieudonné. On accuse l’humoriste (son spectacle) d’antisémitisme. Je ne suis pas en mesure de me prononcer sur cette affaire. J’ai assisté à un tas de débats, d’attaques et de répliques et j'ignore encore de quoi il en retourne. Il y a du politique, des influences, etc. L’affaire est devenue tellement démesurée que les camps se sont polarisés : cul-de-sac, on interdit sans arrêter quiconque, étrange.
À Montréal on a refusé de louer les grandes salles pour les conférences de certains leadeurs musulmans prônant la charia, les contraintes (c’est le moins qu’on puisse dire) vestimentaires des femmes musulmanes, l’interdiction des femmes de travailler ou de vivre de façon libre, l’obligation aux femmes de se soumettre aux hommes.
Je n’approuve pas ces leadeurs religieux, ni les propos racistes, mais il faut faire gaffe de ne pas se bâillonner soi-même. Peut-être ne faut-il pas taire tout sujet délicat ou propos risquant d’exacerber les passions. Je sais que des orateurs mal intentionnés voudraient profiter d’un pays qui prône la liberté d’expression pour propager des propos haineux, diffamatoires ou discriminatoires, mais en laissant la parole à tous, les gens de bon sens pourront aussi s’exprimer et le public saura choisir, ne le sous-estimons pas. Il restera toujours la loi pour poursuivre en justice ceux qui vont trop loin. Après tout, nous vivons encore dans une société de droit.
Bref, il faut parfois réagir, peut-être interdire exceptionnellement tout en faisant gaffe de ne pas aller trop loin. Chose certaine, les paroles déplacées, les sarcasmes, l’ironie, l’humour noir, les paroles acérées et les critiques ne devraient pas faire partie des propos à bannir. Laisser un imbécile, même extrémiste, parler en public est moins dangereux que de museler une population, même de façon partielle.
Grand-Langue

11 janvier 2014

Mars One

Êtes-vous partant pour Mars? En ce qui me concerne, je passe mon tour. J’aime l’hiver mais une température moyenne de -67°C dépasse mon seuil de tolérance. C’est sans considérer le facteur éolien (comme on dit sur Terre), dans ce coin de l’Univers, les vents de 100 à 300 km/h sont courants! Pour un Terrien, l’atmosphère y est irrespirable, ce n'est rien pour m’encourager et on ne sait toujours pas comment protéger les cosmonautes du rayonnement cosmique (cancer, peau, yeux, etc.). Vous me direz que je m’attarde aux détails, c’est une manie chez moi. On dit que tout cela sera réglé car il reste dix ans avant le grand départ. Dix ans, c’est si court. Dans dix ans l’échangeur Turcot ne sera même pas complété!
D’autres questions surgissent : possède-t-on un vaisseau pour se rendre là-bas? Pourra-t-on y faire pousser des carottes? Il faudra voyager pendant sept mois avant d’arriver à destination. C’est long, plus long que d’aller à Cuba et une fois sur place, nos voyageurs devront encore vivre cloisonnés… pour le reste de leur vie. Nous parlons ici d’un voyage « one-way ». Les immigrants planétaires auront avantage à bien s’entendre, car il n’y aura personne pour régler les litiges, personne à qui se confier.
Le défi sera grand. Vivre dans les mêmes vêtements pendant plusieurs décennies sera « usant ». Se priver de promenades en forêt, de balades en vélo, de séjours au bord de la mer, de gueuletons entre copains constituera autant d’épreuves. Terminé le magasinage, les visites chez la coiffeuse et les sorties au cinéma. Nos amis devront se passer de leur médecin, leur dentiste et leur optométriste. D’un autre côté, fini les tracasseries administratives avec la municipalité ou le gouvernement, plus besoin d’aller à l’école ou d’obtenir un permis de conduire.
Tout cela coutera-t-il cher? L’organisateur de cette grande aventure est un Néerlandais. Il rêvait d’un projet excluant l’implication d’un gouvernement. Le secteur privé s’occupera de tout. C’est à la mode sur Terre. Les profits seront au rendez-vous, tant qu’il n’y aura pas d’obligations à rencontrer. Si ça dérape, le projet pourra toujours être transféré aux divers États terriens. On le sait, sur Terre les profits sont privatisés et les déficits étatisés.
Toujours selon Bas (le prénom du fondateur du projet), le tout sera financé par une téléréalité et la générosité du public. Notez qu’on vend déjà des t-shirts, des pièces commémoratives et d’autres gadgets du même acabit. Ainsi, des milliards de Terriens suivront les péripéties de 24 colons interplanétaires sur leurs écrans. Ces colons auront été sélectionnés grâce aux votes des téléspectateurs ($)! Le spectacle a besoin d’être bon, car si le public délaisse la série, le financement périclitera et les véhicules ravitailleurs ne partiront plus. Voir mourir les premiers colons constituera le moment fort de la série. Ensuite, puisque les téléspectateurs se nourrissent de nouveautés, il y aura une chute de l’intérêt et dès 2028 ils changeront de chaine.
Tout cela est à mes yeux, une grosse farce, voire une tromperie. Il y a de l’argent à faire, donc le projet vivra sans aboutir ou sera éternellement repoussé. N’empêche que je suis heureux que l’aventure spatiale redevienne populaire (surtout grâce à la Chine qui s’intéresse sérieusement à la chose). Depuis qu’un homme a marché sur la Lune, il me semble que l’intérêt pour l’exploration spatiale avait disparu chez le citoyen ordinaire. Personnellement, je me nourris des découvertes et divers travaux dans ce domaine. Les mêmes commentaires entendus en 1960 sont entendus aujourd’hui soit « … tant qu’il y aura des problèmes sur Terre, pourquoi dépenser de l’argent pour l'exploration spatiale ». C’est le raisonnement qui me déprime le plus. Christophe Colomb et Vespucci se sont butés aux mêmes arguments.
J’ignore pourquoi, mais l’être humain, comme c’est le cas pour les autres espèces, ressent le besoin de se reproduire, de se multiplier, d’étendre son territoire. Voilà pourquoi nous explorerons l’Univers, et plus encore. La curiosité et la recherche de nos origines constituent des motivations. Nous ignorons presque tout en physique, en astronomie comme dans les autres domaines. Nous commençons tout juste à comprendre que le temps n’existe pas sans le facteur « espace ». Plusieurs y voient la clé pour les longs voyages, pour sortir du système solaire. Nous mourrons tous avant de comprendre la chose mais puisque de générations en générations nous réussissons tant bien que mal à transmettre notre savoir, il faut creuser le sujet.
Ainsi, si Mars One peut faire revivre l’idée d’établir une colonie ailleurs que sur Terre, j’y vois un point positif. Cela dirigera notre regard ailleurs que sur nos propres personnes. Peut-être n’est-ce pas une mauvaise idée de prendre des routes hasardeuses pour susciter l’intérêt populaire. Néanmoins, je suis moins certain de cela. En prenant connaissance du projet Mars One, des questions me sont venues à l’esprit :
Quel sera le statut de Mars? Un pays? Une région? Un territoire? Une dépendance?
S’il y a naissance sur Mars, les nouveaux nés seront Martiens. Auront-ils un passeport?
Les Martiens (descendants de Terriens), devront-ils obtenir un visa pour venir sur Terre?
Quelle langue parlera-t-on sur Mars?
La Lune est Américaine (sic). Quel drapeau flottera sur Mars?
Va-t-on y établir un gouvernement? Y aura-t-il un ministère de l’immigration?
Un gouvernement martien établira-t-il ses propres lois?
Mars pourrait-elle se considérer indépendance face à la Terre?
Qui pourrait répondre à mes questions? Mars One se dit non gouvernemental, non politisé.
Dernière question, les Martiens pourront-ils participer aux J.O.?
Grand-Langue

13 octobre 2013

Aux urnes citoyens!

L’automne est là, mes travaux extérieurs achèvent. Ma belle saison commence. Les feuilles tombent, mes pommes à compote aussi. Seules les pancartes électorales poussent. Elles poussent sur la multitude de poteaux qui embellissent nos rues et chemins. Il y aura bientôt des élections dans toutes les municipalités du Québec et ensuite viendront les élections provinciales (Québec). C’est la rumeur, une rumeur qui m’irrite.
Avec l’âge je m’intéresse de moins en moins aux élections. À mes yeux il ne s’agit plus d’une démarche démocratique mais d’une agression en règle prenant la forme d’une grosse campagne publicitaire ultra plate. Je préférerais percevoir un changement d’attitude chez les citoyens, un changement quant à leur niveau de tolérance, d’indifférence ou d’implication. J’ai l’impression que l’on vote sans trop savoir pourquoi. Il doit bien y avoir une raison à toutes ces pancartes laides et insignifiantes. Il y a même des gens qui installent de grandes pancartes sur leur terrain, devant leur maison. Beurk! Quel candidat sensible à l’environnement ferait ça devant sa propre demeure? Réponse : celui de mon quartier!
Au municipal, j’estime qu’il ne devrait pas y avoir de partis. Il me semble qu’un groupe d’hommes et de femmes indépendants seraient moins portés à la connivence. Il y aurait moins de décisions prises en fonction de la ligne de parti, moins de compromissions et plus de compromis. Stop, je suis trop sérieux alors que la chose ne l’est pas du tout.
Il y a quatre ans, madame la maire actuelle passait devant ma demeure alors que je m’affairais sur le terrain. Je lui ai demandé quel était sa vision, la philosophie de son parti. Elle m’a regardé  estomaquée, ne sachant quoi répondre. Ma question ressemblait à un piège. Elle m’a plutôt demandé ce qui ne faisait pas mon affaire dans le quartier, sachant qu’il est plus pratique de dire ce que l’électeur souhaite entendre. J’ai répondu qu’il y avait trop d’enfants, trop de vieux, trop d’immigrés et trop de chiens, trop de logements à prix modiques, qu’il y avait trop de parcs, trop d’arbres, trop de feuilles à ramasser et pas assez d’asphalte. Me croyant dangereux elle m’a serré la main et s’est rendue chez mon voisin.
En contrepartie de ces pancartes à la fois laides et méprisantes, j’estime avoir le droit de m’amuser un brin. Jeudi passé une candidate est passée et a simplement donné un pamphlet à ma conjointe. J’ai demandé à ma conjointe que si ça produisait de nouveau, de faire entrer la personne, de lui offrir un café et de m’appeler, je m’occuperais du reste. Le sourire de ma conjointe parlait. Mon voisin d’en face (un avocat un peu fou) et mon voisin d’à côté (l’indien) voudraient organiser un dîner de con avec les divers candidats. En campagne électorale, je ne vois comment les candidats pourraient refuser une telle invitation. Nous préparons donc nos questions, juste au cas.

Grand-Langue