22 septembre 2013

Impossible de passer à côté!

Je reste ambivalent face au projet de charte de Pauline Marois. Ma principale hésitation découle de mon manque de confiance envers cette femme qui souhaite probablement que sa charte devienne un enjeu électoral, sachant que les autres facettes de son administration seront difficilement défendables. Le PQ étant minoritaire, comment voir la chose autrement?
Je favorise la laïcité, sans en faire une religion. Je reste insensible aux larmes de crocodile provenant de communautés et de regroupements refusant de se départir de leurs machins ostentatoires pendant les heures de travail, s’ils bossent pour le gouvernement. Je suis incapable de croire que le salut d’un homme passe par son turban, son couteau ou son voile. Que pourrait exiger Raël? Son costume de bonhomme Michelin? Mon avis est biaisé, je ne suis pas croyant.
Comment rester sérieux alors que le sujet est sensible, mais pas vraiment sérieux. En voici la preuve : L’Ontario se vante de ne pas avoir une telle charte. Premièrement on s’en fout, deuxièmement ils n’ont pas le choix, la moitié de la population de Toronto n’est pas née au pays! Les gens pourront toujours gravir les marches de l’oratoire St-Joseph à genoux ou égorger leur animal dans la cage d’escalier de leur immeuble, on leur demande simplement de ne pas mêler le gouvernement à leurs pratiques religieuses et à leurs croyances personnelles. Le gouvernement est capable de se ridiculiser tout seul.
En ce sens, à quoi rime cette obsession qui consiste à conserver le crucifix à l’Assemblée nationale? Un symbole patrimonial? C’est la représentation d’une période noire, abrutissante. Nos élus pensent aux votes. Si on interdit les symboles religieux, qu’on décroche le Christ du mur, on l’a assez vu! Cet objet est à l’endroit le plus en vue de l’appareil gouvernemental laïc du Québec. Nous savons aussi qu’il y a une chapelle catholique dans ce même édifice.
Entre nous, cette charte sera vue (à tort) comme une parade à l’intégrisme musulman. On ne veut pas allouer des congés additionnels selon les religions diverses, on ne veut pas réserver des endroits de prières dans nos écoles, on ne veut pas devoir offrir les services d’un médecin, policier ou professeur d’un sexe spécifique selon les exigences des uns ou des autres.
Personnellement, je crois que toutes ces demandes peuvent être refusées sans cette charte. Nous ne sommes pas obligés de reculer socialement parlant. C’est comme pour la langue, suffit de se tenir debout. On demande toujours à notre gouvernement de se substituer à notre manque de cran. Je peux difficilement croire qu’une infirmière avec un voile est moins bonne qu’une autre, c’est un cliché. Je doute que des bouddhistes fassent du recrutement dans nos garderies. Étendre les restrictions à des gens qui n’occupent pas des positions particulières est peut-être exagéré. Faudrait aussi m'expliquer quelles sont les « valeurs » québécoises. Des valeurs c’est universel, on a entendu ça dernièrement. Nous vivons dans une société de droit et si on croit que certaines facettes de la loi ne passeront pas le filtre des tribunaux, il faut modifier la loi, le jeu n’en vaut pas la chandelle. Il faut admettre la réalité démographique et respecter la charte des droits et des libertés du Québec qui doit inclure l’égalité entre les hommes et les femmes.
Tout cela me fait croire que la tempête dans un verre d’eau est une tactique électoraliste. De vrais enjeux se présenteront et ce ne sera pas la charte qui tranchera, ce seront les citoyens, les élus ou les tribunaux.
S’il y a un point positif, c’est que les nouveaux arrivants savent maintenant que nous sommes contre l’envahissement du religieux dans notre société.
Grand-Langue

20 commentaires:

  1. Je vais sûrement vous étonner cette fois (comme quoi je suis pas toujours 100 % prévisible!...) mais je suis tout à fait d'accord avec votre point de vue. Je n'aurais peut-être pas dit ça il y a quelques années mais je suis rendue là.

    J'ai écouté hier soir à l'émission Tout le monde en parle l'échange entre Drainville et Bouchard qui, même en étant très civilisé, illustrait un malaise à peu près irréconciliable entre leur position, celui-là même que vous résumez très bien dans votre billet.

    J'applaudis votre phrase : « C’est comme pour la langue, suffit de se tenir debout. On demande toujours à notre gouvernement de se substituer à notre manque de cran.» ainsi que votre conclusion positive.

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  2. Avec toutes les erreurs qu'ils ont fait depuis qu'ils ont le pouvoir, c'est l'apothéose ce projet. Le problème de signes religieux au sein de l'administration de l'État ne nous regarde pas, c'est l'affaire du gouvernement ! Alors pourquoi en faire un débat social ! Électoraliste pour sûr. Plusieurs disent qu'elle (Marois) veut que son gouvernement soit renversé sur ce projet de loi et ensuite demander un mandat FORT (majoritaire). Je serais pas surprise que ce soit plutôt un gouvernement minoritaire LIBÉRAL qui sera élu. Quelle merde !

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  3. Je n'aime pas voir le crucifix au-dessus de la tête de nos élus. Ce n'est qu'une relique du passé douteux de Duplessis.
    Pour moi, le voile représente la domination de l'homme sur la femme. Nos mères ont connu la même chose et elles s'en sont débarrassés.
    Moi aussi, je ne crois qu'en un enjeu électoral.

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  4. Comme toujours, voilà une excellente prise de position. Et j'adore tout particulièrement ton dernier paragraphe.
    Je crois en un état laïque et quand je vois tous ceux qui s'expriment haut et fort, on voit qu'il fallait mettre le sujet sur la table.

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  5. Zoreilles,

    Cessez de dire que vous êtes prévisible! Vous ne l'êtes pas... sauf si on attaque votre région (rire).

    Je suis ambivalent pour plusieurs raisons. Il y a la charte des droits et libertés mais il y a aussi les conséquences d'une immigration massive. Il y a les droits individuels mais il y a aussi des sociétés qui tiennent à leur façon de vivre. Il y a le droit fondamental de pratiquer une religion et il y a cette religion musulmane qui s'impose partout et que l'on associe à un recul. Il y a ces femmes qui sont libres de cacher leur corps et il y a une égalité des sexe à laquelle on tient.

    Les autres sociétés nord-américaines qui jugent le Québec sévèrement pourraient très bien un jour copier cette charte tout comme plusieurs états américains ont copié la Loi 101.

    Alors... comment tirer une conclusion claire. Chose certaine, les titres, les Unes, les cris sont exagérés.


    Rainette,

    Les dirigeants, penseurs et vedettes du PQ sont décevantes. Pour moi, le véritable PQ fut celui du premier mandat de René Lévesque. S'agit-il d'une nostalgie à 5 sous? Il me semble que l'équipe était forte, porteuse de changements souhaités par tant de citoyens. Les calculs électoralistes étaient moins évidents. Après ça s'est évidemment gâté.


    Le Factotum,

    Le voile et plusieurs autres "coutumes religieuses" me déplaisent. Ça ne m'autorise pas à les interdire mais il y a des circonstances et des moments où je trangresserais les règles.


    Grand-Langue

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  6. Jacks,

    Je n'oserais pas qualifier mon billet de prise de position, je ne suis pas clair, pas tout à fait sûr de ce qu'il faut faire. Il y a pire que de prendre position, il y a la possibilité de se faire débouter en cour.

    Voilà pourquoi je pense qu'il faudrait moduler l'aspect "vestimentaire". Nous verrons ce que fera le gouvernement mais je me méfie de ses vrais objectifs.

    Grand-Langue

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  7. La première phrase de la charte canadienne des droits se lit comme suit: "Attendu que le Canada est fondé sur des principes qui reconnaissent la suprématie de Dieu et la primauté du droit". Et le Québec est soumis à cette charte. Pas mal pour un état laïque. :)

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  8. Et oui, on dirait que notre passé nous rejoint! À l'époque on faisait tout baptiser, nos champs, le métro, et même notre charte!

    J'aimerais savoir s'il y a des pays où les cours de justice ne disent pas la même chose. Comment faire croire aux gens qu'une charte, une constitution ou une cour de justice est au dessus de tout sans mentionner le mot Dieu?

    Grand-Langue

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  9. Grand-Langue,

    Le terme prise de position n'était pas le plus approprié. J'ai pris la première expression qui m'est venue à l'esprit. Je ne voulais pas manqué le début du bulletin de nouvelle où on allait surement parlé de la Charte. :-)
    Tu as écrit: je ne suis pas clair, pas tout à fait sûr de ce qu'il faut faire. Il y a pire que de prendre position (...).

    C'est justement ce qui me plait dans ton propos. Le sujet est tellement vaste, demande tellement de nuances et de réflexions. Seuls les sots peuvent être sûrs de tout ce qu'ils avancent. Ce que je pense aujourd'hui est tellement différent de ce que je pensais il y a 10 ans. Pour évoluer, il faut savoir laisser de la place pour les remises en question.

    Parler en même temps d'identité, de valeurs, de patrimoine et de religion en même temps, c'est tout un défi. Mais je crois qu'il faut le faire. Le problème n'est peut-être pas très grave actuellement, mais c'est justement pourquoi il faut le faire maintenant. Ce n'est pas lorsque le feu est pris qu'il faut parler de prévention. Dans une période où tout ne va pas si mal, où il y a tout de même un bon degré de tolérance et d'ouverture, on voit déjà les passions se soulever. On peut imaginer ce que ce serait si on devait faire le débat dans un contexte de tensions extrêmes exacerbées par une situation regrettable pouvant être liée à des événements susceptibles de se produire.

    D'accord, notre vie actuelle n'est pas dramatique. Il ne faut pas penser à notre situation actuelle mais à celle qui pourrait exister dans 15 ou 20 ans. Et il est bon que les nouveaux citoyens du Québec aient une meilleure idée du contexte d'ici, de nos valeurs, nos façons de vivre, avant de décider de venir émigrer ici.

    Tenir compte des nouveaux arrivants, c'est bien, c'est souhaitable, stimulant. Ils ont beaucoup à nous apporter. Mais encore faut-il être capable de mettre les nouvelles idées sur la table, en discuter publiquement sans se faire accuser d'être racistes.

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  10. Je crois aussi que la meilleure chose dans toute cette affaire c'est qu'un message est envoyé au Monde à l'effet qu'il y a ici une culture, une façon de vivre que nous ne voulons pas abandonner.

    Une charte n'empêchera pas les situations grotesques mais la non acceptation de n'importe quoi est une forme de balise. Ce faisant, il faut faire gaffe à ne pas empiéter sur les droits fondamentaux. L'humain n'est pas fait d'un seul bloc, il est constitué de plusieurs pans dont celui de la foi. Pour se prétéger de ceux qui sont en croisade il ne faut quand même pas tout renier.

    J'ai toujorus affirmé que la religion (l'église) joue encore un rôle important dans notre société. Comment expliquer que tant de québécois tiennent au crucifix de l'Assemblée Nationale. Je ne crois pas à la version de patrimoine. Qu'en serait-il si les évêques s'étaient prononcés pour conserver cet emblème?

    Grand-Langue

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  11. C'est en plein, exactement ... ça ! Rien à ajouter.

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  12. Croco,

    C'est exactement ça et en même temps, je ne prends pas vraimnent position. Comme le disait Jackss, on tente de simplifier ce qui fondamentalement n'est pas aussi simple.

    Grand-Langue

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  13. Grand-Langue,

    Parler en même temps d'identité, de valeurs nationales, de patrimoines et de symboles religieux ostentatoires, voilà tout un défi! On a déjà fait des guerres un peu partout pour beaucoup moins. Et je n'ai jamais compris pourquoi des croyances pouvaient soulever tant de passions. Nous avons même dû annuler un conventum de classe parce que le sujet avait enflammé nos échanges.
    J'ai bien aimé ce commentaire de Foglia : Je suis athée, résolument athé, mais de culture chrétienne.

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  14. Chacun se défini à sa façon et se dit ouvert aux croyances des autres jusqu'à ce qu'une communauté ou un groupe important d'individus vienne bousculer ce à quoi on est habitué. Et puis, il y a les exemples venant d'ailleurs qui font peur, des exemples de violences associées aux orthodoxes.

    Grand-Langue

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  15. Très juste!

    C'est facile de se montrer ouvert quand les autres croyances sont si diversifiées et si peu répandues. La culture chrétienne, au sens de Foglia, est largement majoritaire. Mais qu'en sera-t-il le jour où une autre religion menacera d'occuper la première place et menacer autant la culture que les institutions établies ici depuis 300 ans.

    Les frontières entre les pays ont servi jusqu'ici à assurer une certaines homogénité entre les gens. Le contrôle de l'immigration laissait plus de latitude à nos dirigeants. De nouveaux droits internationaux rendent le contrôle des frontière plus difficile et on ne se préoccupe pas tellement d'intégrer les nouveaux arrivants à leur nouvelle terre d'accueil. La majorité d'aujourd'hui risque donc de se sentir menacer.

    Quand les frontières d'un pays deviennent moins étanches, les individuels ont tendance à créer des barrières plus opaques entre eux. C'est alors que les fossès se creusent et que la tolérance fait place à l'intolérance.

    C!est le genre de réflexions qu'on devrait mettre sur la table pendant que le climat s'y prête. Dans les années 50 et 60, nos communautés religieuses ont décidé d'elle-mêmes d'abandonner leurs sostumes sans y être obligées. Ceci a permis une évolution tranquille vers une société civile. Il ne devrait surtout pas y avoir de recul à cet égard. Dans l'histoire, on a trop commis de crimes et d'injustices au nom de Dieu.

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  16. http://dinosaure80.canalblog.com29 septembre 2013 à 13 h 33

    Que chacun aie sa religion librement chez lui. Mais ne pas vouloir vivre selon ses conceptions "chez les autres. C'est le problème que nous vivons chez nous en Belgique. Tout signe religieux est interdit dans les lieux publics et les écoles. Le problème du port du voile est constant dans certaines écoles.

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  17. En tout cas, on en parle... ici et ailleurs dans le monde et c'était l'objectif le plus louable de notre gouvernement (même s'il en avait d'autres!...). Je suis moins découragée que je l'étais au début quand ils ont lancé ce véritable pavé dans la mare. Je me rends compte qu'il était temps qu'on en discute sur la place publique, dans nos médias, dans nos maisons, dans nos cercles d'amis(es) et partout où l'on se rend compte qu'il faut établir des balises pendant qu'il en est encore temps et que ça se peut encore. Sinon, ça pourrait un jour faire des tensions assez vives comme on le voit dans d'autres coins de la planète. Une société laïque au Québec semble être le consensus le plus large et le plus solide jusqu'à maintenant. Construisons là-dessus!

    Hier soir, j'écoutais TLMEP, j'étais intéressée d'entendre les points de vue de Djemila Ben Habib et la jolie jeune femme voilée dont j'oublie le nom. Il était surtout question du hijab. Qui de mieux que cette jeune femme brillante, articulée, cultivée, au charisme certain, à l'éloquence et la vivacité d'esprit hors du commun, aurait pu nous convaincre de l'aspect culturel, non religieux et non politique de ce qu'elle portait pour cacher sa chevelure, un point de vue qui est fortement revendiqué à l'heure actuelle? Je ne sais pas mais dans mon cas, elle n'y est pas arrivée du tout.

    Qu'on le veuille ou non, le crucifix à l'Assemblée nationale, c'est comme le hijab pour certaines cultures : on aura beau essayer de les dénuer de toute signification autre que patrimoine et culture, n'empêche que ces symboles revêtiront toujours une sorte d'affirmation (même pacifique) de ce qu'on rejette : inégalités et abus de pouvoir.

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  18. Zoreilles,

    J'abonde dans le même sens que vous, sur toute la ligne. La jeune voilée ne m'a pas touché. Elle parlait comme si elle n'avait pas le droit de porter son voile où que ce soit! On laisse planer ce genre de doute. Je préférais les propos du cuisto! Pourquoi donc est-ce si difficile d'enlever le voile au travail? J'accroche là-dessus. Et puis, je constate aussi qu'il s'agit de mesures qui vise les musulmans avant tout. Avouons-le.

    Grand-Langue

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  19. Comme vous, j’ai été longtemps ambivalente face à cette partie de la Charte concernant le port de signes religieux ostentatoires dans la fonction publique. Les raisons que vous évoquez dans votre réponse à Zoreilles étaient celles qui alimentaient mon questionnement.
    Les propos que se tiennent ici dans les commentaires sont très intéressants. J’aime qu’on jette un œil sur le passé et qu’en même temps on se projette dans l’avenir.
    Après bien des hésitations, je suis sortie de mon mutisme et j’ai publié un billet sur le sujet avec une approche différente de la vôtre.

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  20. Caboche,

    J'arrive de chez vous et votre billet vaut d'être lu. Je vous reprocherai seulement une chose (ce que je ne fais presque jamais) c'est de ne pas écrire assez souvent. Vos billets sont toujours pertinents et nous aimerions vous lire plus souvent!

    Grand-Langue

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